Chasse au lynx

Loin du Souverain Ti Mong arriva à la hauteur d ela portiére du carosse de la Princesse Li Tchen, il avait préparé à son intention un poéme,


Avez-vous vu, hommes,
Une Princesse au sein bruni ?
Pâle comme un beau soir d'automne !
C'est ma maîtresse, ma lionne !
La Princesse Li !

J'ai fait bien des chansons pour elle,
Je me suis battu bien souvent.
Bien souvent j'ai fait sentinelle,
Pour voir le coin de sa prunelle,
Quand son rideau tremblait au vent.

Elle est à moi, moi seul au monde.
Ses grands sourcils noirs sont à moi,
Son corps souple et sa jambe ronde,
Sa chevelure qui l'inonde,
Plus longue qu'un manteau de roi !

C'est à moi son beau corps qui penche
Quand elle dort dans son boudoir,
Et sa cape sur sa hanche,
Son bras dans sa mitaine blanche,
Son pied dans son brodequin noir.

Vrai Dieu ! Lorsque son oeil pétille
Sous la frange de ses réseaux,
Rien que pour toucher sa mantille,
De par toutes les étoiles qui brillent ,
On se ferait rompre les os.

Qu'elle est superbe en son désordre,
Quand elle tombe, les seins nus,
Qu'on la voit, béante, se tordre
Dans un baiser de rage, et mordre
En criant des mots inconnus !

Et qu'elle est folle dans sa joie,
Lorsqu'elle chante le matin,
Lorsqu'en tirant son bas de soie,
Elle fait, sur son flanc qui ploie,
Craquer son corset de satin !

Allons, mon page, en embuscades !
Allons ! la belle nuit d'été !
Je veux ce soir des sérénades
À faire damner !

Ti Mong, savait le poéme leste, mais il était à la hauteur de la passion dévorante pour la jeune preincesse, chaque jour plus belle.

Mais les deux tourtereaux ne se rendaient pas compte que le destin du Royaume se jouait non loin de là, sous le couvert des arbres. Comment pouvait-il savoir que l'avenir du Mnibet allait probablement basculer d'un moment à l'autre ? Soudain, un nouveau coup de feu perturba une fois encore le bois, d'habitude si calme, hormis en ce jour si particulier. Le fauve s'écroula presque aux pieds de celui qui aurait pu être sa proie. Son blanc pelage était désormais maculé de sang.

Un homme, munis d'un mousquet encore fumant, sorti d'un fourré tandis que le valet aidait le Souverain à se relever. Tout deux se remettaient de leur effroi, regardant avec stupeur l'homme qui s'approchait. C'était un simple soldat de la Garde Royale, d'une trentaine d'année, à la peau burinée. Une balafre lui morcelait le visage de la pommette droite jusqu'au milieu du front.

- Quel est ton nom ? lui demanda l'Outamaraya.

- Je me nomme Kamran Pradip "la balafre" Votre Majesté, fils de Sabrang Danvir, au service de Votre Garde depuis quatre année. répondit-il en s'agenouillant.

- Tu Nous a sauvé la vie, car Dieu t'as conduit jusqu'à moi pour ce fait. De ce jour, nos vies en seront marquées à jamais. Un tel exploit fera de toi un noble désormais. Tu seras Sire Kamran Pradip de Nidhi, hobereau de Tingri.

- Ô mon Seigneur et Maître, jusqu'à ma mort je resterai à vos côtés. Je me montrerai digne de toutes mes forces de l'honneur que vous m'accordez.

L'Outamaraya lui ordonna alors de se relever. La fierté pouvait se lire dans les yeux du balafré, recevant un titre bien rarement accordé à un homme de son milieu, titre signifiant la richesse par les terres qui lui seront octroyées, l'honneur, et l'estime.

Des piaillements provenant de la grotte attirèrent l'attention du Monarque, qui y entra avec prudence, protégé par ses serviteurs. Sur un tapis de feuilles, trois bébés lynx blancs de quelques semaines, effrayés par les inconnus, attendaient le retour de leur mère, morte. Les petits allaient rencontrer le même sort que leur génitrice désormais, et c'est pourquoi l'Outamaraya ordonna que les petits fauves soient emmenés, pour essayer de les domestiquer. Le valet fit sonner son cor pour appeler au rassemblement des chasseurs aux caravanes, et il suivit alors l'Outamaraya et le nouvel Hobereau, portant les petits lynx.