demande de rencontre

De la part de sa Majesté Oma Laghuvi


O Très Sage Namdak,

J'ai besoin de rencontrer afin de t'entretenir de differents sujets.
Suivant tes conseils avisés, j'ai fait une retraite dans un bozudzong éloigné afin de me laver du poids de mes réincarnations passées.

Les bozus m'ont confiés des rouleaux anciens où sont recopiés des textes rares et sacrés, afin que je te les apporte moi-même.

En attendant ta réponse je prie chaque jour pour me rapprocher de l'Eveil.

La reine, Oma Laghuvi

La Reine Oma Laghuvi accompagnée par ses deux suivantes préférées et une petit escorte d'hommes armés se présente à l'entrée du Grand Temple Nyima.
Un jeune homme au crâne rasé, drapé dans une grande étole de lin épais, d'une blancheur immaculée, accourt pour l'accueillir.
A trois pas de la Reine, il s'agenouille et incline son front vers le sol en signe de respect.

La Reine et ses dames, observant l'étiquette, font mine de ne pas l'avoir remarqué.

Le jeune bozu se relève et les dames le suivent à quelques mètres de distance.
Leur guide les conduit à jusqu'à un salon dont les murs sont recouverts de bois sombre. Une frise ancienne représentant des mentoks pourpres rehaussés d'or court le long des murs.
Tout au fond, un autel recouvert de soieries brodées, où trône une statue du Dieu en argent massif au visage empreint d'un mélange de douceur et de bonté.


Au centre de la pièce une petite table ronde supporte un plateau de cuivre ouvragé.
Autour, des coussins épais parsèment le parquet luisant pour que les visiteuses puissent attendre l'arrivée du Namdak.

Tandis que la Reine et ses suivantes prennent place, le jeune homme s'éclipse, le temps d'aller aux cuisines.

Il en revient porteur d'une grande théière en argent contenant le thé noir, parfumé à la cardamome, où finit de fondre le beurre de yack.
Un autre bozu, plus âgé, apporte dans une corbeille d'osier des petits bols en céramique ainsi qu'un plateau garni de biscuit aux pétales de roses, parsemés de graines de sésame.

La reine sourit et l'une des suivantes se lève pour expliquer : " Sa Majesté est tout à fait satisfaite de l'accueil qui lui est réservé. Elle attendra ici le bon vouloir du Très Sage Namdak"

Le plus âgé des deux hommes répond : " Le Temple est honoré par cette visite. Le Namdak a été prévenu et ne devrait pas tarder.
Que le Dieu répande des pétales de Mentok sous les pas de Sa Majesté afin que Son Existence soit aussi douce que le miel sauvage de nos montagnes."

Les deux hommes, après un dernier salut, se retirent.

" O Grand Namdak " répondit la Reine :"Daigne accepter ce présent offert par les bozus du bozudzong de la Montagne Bleue. Ils m'ont chargé de te l'offrir en leur nom."

Une des suivantes alla s'incliner devant le Namdak, puis déposa sur un coffre ancien des rouleaux de parchemins dans leur étui de soie peinte.
La Reine, sans mot dire, alla rajouter un coffret de bois finement sculpté. Il s'agissait de son cadeau personnel pour le Très Sage. Une statue de jade ancien en position du Mentok.
L'usage ne voulait pas qu'elle en fit mention.

Sur un signe, les suivantes quittèrent la pièce.

" Alors Reine Oma, as-tu trouvé la paix en ces lieux éloignés ? ": demanda le Namdack d'une voix douce.

La Reine courba la tête et la lumière des lampes en bronze, où brûlaient l'huile, fit scintiller les épingles d'argent et de turquoise qui ornaient sa coiffure.

" O Namdak, j'ai enfin trouvé le courage d'accepter la Volonté du Dieu..."

" Je vois que tu as atteint un état de paix intérieure, le Dieu Soit remercié !"

" Mon destin sera donc de soutenir mon Epoux dans sa tâche. Puis il y a Li-Sun la Soeur Cadette de sa Majesté. Son sourire est venu éclairer ma vie... "

Pour chaque mère, le soleil ne brille que sur son enfant, s'exclama le vieil homme, mais tu as appris à faire briller ce soleil sur tes proches. Sans est-ce la fatalité qui a voulu cela, mais la voir comme une punition ce serait tendre à la souffrance. C'est une opportunité pour toi de t'émanciper de ton rôle de mère, et de devenir une protectrice universelle.

La Reine Oma et le Très Sage burent un peu de thé dans les coupelles en raku, finement veinées de noir.

La Reine répondit d'une voix douce :" Comme tu connais bien les Chemins de l'âme humaine, Namdak. Tu sais trouver les mots qui apaisent et qui encouragent.
Vois-tu, mon Epoux l'Outamaraya est semblable à un Père pour son Peuple. Et peut-être que... A mon niveau... Je pourrais seconder mon Roi dans sa mission... J'ai eu le temps de méditer, au bozudzong. Loin des tentations de ce monde.

J'ai traversé des villages, j'ai parlé à de nombreux bozus. J'ai entendu l'enseignement qu'ils prodiguent et j'ai constaté le bénéfice qu'en tiraient les plus jeunes.
J'ai vu aussi que seuls les plus riches pouvaient se permettre d'envoyer leurs enfants à l'école.
Les paysans ont besoin que leurs enfants restent aux champs pour les aider.

Pourtant, il faudrait que ceux qui le souhaitent puissent avoir accès à ce savoir. Que les enfants de notre monde sachent lire et écrire notre langue pour mieux la préserver. Mais cela nécessiterait de grands changements.
Qu'en penses-tu Grand Namdak ? Crois-tu que ce temps soit venu pour le Mnibet ?"

Certes, il y a l'aspect financier. La Reine " fit Oma Laghuvi d'un air majestueux
est prête à financer des projets sur sa cassette personnelle. Mais ce sera au Roi Dorje Dorsel le Troisième de décider et au grand Conseil d'exprimer son avis.
C'est une grande et noble de tâche que celle d'éduquer tout un peuple, et le Chemin sera long.
Il faudra des bâtiments, des professeurs, des cuisiniers. Si l'on veut que les enfants des plus pauvres viennent jusqu'à l'école, il faudra que les bozus en parlent dans les villages, convaincre les parents qui n'ont pas eu cette chance de l'intérêt du Savoir.
Ils faudra nourrir ces enfants."

La Reine semble réfléchir, les yeux perdus dans le vague.